Aimer - connaître

Aimer - connaître
Photo de Guy Leroy

dimanche 28 décembre 2014

Fi !


Source : http://www.williedeutsch.com


Fi aux Noëls rosâtres et doucereux
Noël, c’est un enfant
illégitime aux yeux des forts.
C’est un Fils divin
le sauveur des cœurs humbles.

Fi aux Noëls des pères-noëls glamour
Noël, c’est une famille
donnée en témoignage au monde.
C’est un peuple en route
uni par l’Esprit d’un Père.

Fi aux Noëls sans racine ni horizon
Noël, c’est un voyage
loin des sécurités modernes.
C’est une aventure
au cœur du mystère de la vie.

Fi aux Noëls sur catalogue
Noël, c’est l’accomplissement
d’une promesse divine et éternelle.
C’est l’avènement
du Salut et la Paix au cœur de l’humanité.

Fi aux Noëls des croyances insensées
Noël, c’est la foi de Marie et de Joseph
Noël, c’est le visage du Dieu fragile
Noël, c’est la naissance de l’Homme sauvé.

Pascal Tornay
(c) 2014

vendredi 21 novembre 2014

Philae, je t'aime !


Pour aller chronologiquement, Philae c’est d’abord une île située en Haute-Egypte sur le Nil et submergée dans les années 1970. Jusqu'en 1974, elle contenait les ruines des temples et d'une ville antique égyptienne.

Aujourd’hui, Philae, c’est surtout la coqueluche des astrophysiciens… Philae est le nom d’un atterrisseur de l'Agence spatiale européenne transporté à quelque 510 millions de km de la Terre par la sonde spatiale Rosetta jusqu'à ce qu'il se pose sur la comète dite Tchoury le 12 novembre 2014, plus de dix ans après avoir quitté notre Terre. Il s'agit du premier atterrissage contrôlé sur un tel astre. Ses instruments ont envoyé les premières images jamais obtenues depuis la surface d'une comète et devraient permettre de faire la première analyse in situ de la composition de son noyau.

Appeler un robot Philae – « qui aime » – : a-t-on idée ? Bizarre, oui ! Sauf que pour les astronomes et les physiciens de l’espace cette histoire est une véritable histoire d’amour. D’ailleurs certains d’entre eux ont pleuré de joie à l’occasion de cet événement unique. Emerveillement de l’Homme aux prises avec un univers infini dont la nouveauté est si incroyable, l’agencement si fin et la cohérence si parfaite qu’ils n’ont de cesse d’étonner nos yeux, nos intelligences et nos cœurs !

L’aventure scientifique – tout comme l’aventure spirituelle – est une aventure humaine qui se conjuguent avec le signe + : un Plus pour les scientifiques, une Croix pour les chrétiens ! Cela dépend de la perspective… Aujourd’hui, la communauté des croyants et celle des scientifiques ont compris qu’ils peuvent regarder ensemble par les deux lorgnettes d’une même jumelle tout aussi passionnément les uns que les autres ! N’y voit-on pas plus clair ainsi ? Mais combien de sang de fils d’hommes n’a-t-il pas fallu verser pour y parvenir ?

Parvenu ? Pas encore totalement si l’on en croit encore les purs et durs de chaque bord qui n’ont pas encore aperçu que la vérité ne se laisse pas voir d’un seul tenant.

Côté ecclésial, on a saisit que le message de la Bible n’est pas un ouvrage journalistique ou historique. On a enfin compris que, prise au pied de la lettre dans son ensemble, elle n’est qu’un tissu d’incohérences et que le message profond et vivifiant est à recueillir sans cesse à travers le texte dans un cœur à cœur avec le Dieu d’amour qui cherche l'Homme. On a constaté concrètement qu’ouvrir sa lecture à d’autres perspectives, notamment historico-critique, est source d’une foi plus réaliste, plus libre, plus puissante !

Côté scientifique, on a saisit que la réalité n’est pas seulement la réalité visible et qu’elle ne se limite pas à un agencement – fut-il extraordinaire – de protons, de neutrons et d’électrons. On a constaté que la science ne donnait pas à voir une totalité, mais qu’elle était, elle aussi, un angle de vue sur une réalité complexe et multiforme. On a réalisé avec modestie que l’Homme et la nature ne se limitent pas à un corpus de cellules, mais on convient plus ou moins qu’il doit exister une force supérieure, une main invisible qui ordonne ceci et le rend… vivant !


Source : www.legorafi.fr
Toutes les tentatives de faire d’une perspective une totalité a mené les hommes à devenir des tyrans sanguinaires pour leurs semblables. Notre compréhension des réalités passées, présentes et à venir restera toujours un balbutiement au regard de l’Infini qui s’offre sans cesse à nous. Loin d’être une nouvelle jérémiade, ce que je viens de dire est bien plutôt un cri d’amour et d’émerveillement. Devant un paysage ahurissant de beauté, on ne s’écrie pas : « Bon sang, je n’y comprends rien ! » Mais on se laisse simplement pénétrer par l’instant merveilleux !

Oui, effet, qu’il est bon de se replacer face à cet Infini…
comme devant cet univers infini qui nous donne le vertige,
comme devant la merveille de la vie qui a jaillit un jour on ne sait comment,
comme devant des scientifiques… qui pleurent. Merci Philae !

Je trouve que Philae nous montre à quel point nous sommes petits. Ni les croyants, ni les savants ne peuvent s’enorgueillir de posséder la vérité ! Rien ni personne ne pourra jamais la posséder et c'est une source de joie ! La vérité – merveille pure – se contemple par une myriade de facettes toujours à partager, à réconcilier. Ce que l’on croit posséder, nous échappe toujours ! Oui, Seigneur, ce que Tu as caché aux ecclésiastiques et aux scientifiques, Tu l’as révélé aux tout-petits…

Je t’aime, Philae !

Pascal Tornay

mercredi 1 octobre 2014

Des actes SVP !


Le P. Raniero Cantalamessa, préchant.
N’est-il pas un peu surprenant, alors que je parle, de dire qu’il s’agit plutôt de faire ! Alors que, justement, ce faisant, je ne fais rien… que dire. D’autant plus que l’on entend souvent dans nos groupes d’Eglise qu’il s’agirait d’ « être » plutôt que de « faire ». Être, dire ou faire : telle est la question. En outre, notez bien que, parfois, « ne pas dire » ou « ne pas faire », c’est justement ce qu’il faut faire ! Dans l’Evangile, Jésus ne cesse d’exhorter ses amis à mettre en pratique les exigences de l’amour. De même, dans la parabole de « L’homme qui avait deux fils » (Mt 21, 28-32), Jésus montre que, finalement, c’est l’acte qui compte. Pour autant, n’allons pas trop vite mépriser la parole. Vous savez bien qu’elle revêt une importance cruciale pour la croissance de la vie humaine. Estimer que l’on puisse s’en passer pour n’être qu’action est pure illusion…

En effet, ne faut-il pas pouvoir (et savoir) s’exprimer pour se connaître et se comprendre ? Parler, n’est-ce pas déjà un agir ? « Ah, si mon mari pouvait parler ! », entend-on souvent dans la bouche de femmes dont le mariage s’est agrippé aux années et qui sont découragées par ce mutisme si souvent masculin. Oui vraiment, la parole peut être un acte réellement créatif et régénérant, concrètement libérant et vivifiant si elle vient d’un cœur qui sait écouter et se donner. La Parole vivante du Seigneur Dieu l’est aussi à combien plus forte raison, puisqu’« elle fait aussitôt ce qu’elle dit ». On le voit dès les commencements, Dieu crée par sa Parole. « Dieu dit : ‘Que la lumière soit’ et la lumière fut. » (Gn 1, 3). A l’image de celle de Dieu, nos paroles ne sont donc pas toujours vaines, puisque elles ont le pouvoir de mettre en mouvement, de consoler, d’encourager, de redresser.


Patrice Emery Lumumba, ancien chef de l’Etat congolais, avertissant.
En rester à la parole, là est le piège… Vous qui êtes des mamans, vous savez bien qu’il faut joindre le geste à la parole ! Ne sont-ce pas les termes utilisée pour définit le mot « sacrement » ? A un petit tombé par terre en jouant, il ne faut pas moins un signe qui s’approche d’un sacrement pour le calmer ! Vous lui dites : « Viens dans mes bras mon petit chéri. Oublie tout cela maintenant ! » et dans le même temps, vous l’inondez de caresses et de baisers. Le voilà le sacrement de l’amour ! Le voilà l’acte pur ! La voilà la parole créatrice ! Voici l’avènement du Christ. Le geste incroyable du lavement des pieds prend ainsi de multiples formes à travers les mille situations du quotidien. Non, le Royaume n’est pas loin. Il est tout proche de celles et ceux qui savent d’abord se mettre à l’écoute et prêchent ensuite. Il est tout proche de ceux qui aiment en actes et en vérité, aujourd’hui, petitement, ici et là.
Pascal Tornay

dimanche 21 septembre 2014

Corruption : c’est dans mon cœur que ça commence !

Tout commence souvent par une définition et, comme dans bien des domaines, chacun la conçoit un peu trop comme ça l’arrange ! Pour le coup, Coluche racontait qu’un des ministres français – dont il aimait tant se ficher – avait été arrêté pour corruption de fonctionnaire. En effet, il avait offert un morceau de sucre à un chien policier…

Trêve de plaisanterie ! Qu’est-ce donc que « corrompre » ? L’étymologie du mot nous ramène à un vocabulaire lié à une cassure, une rupture. La corruption renverrait donc à une relation pervertie, instrumentalisée à des fins malhonnêtes et égoïstes. Engendrée de concert par des personnes qui s’accordent secrètement pour atteindre des buts frauduleux, la corruption détourne le lien social de ses finalités que sont la gratuité, l’amour, la justice, la vérité. Cette anti-culture est évidemment très en vogue dans les milieux économiques (commerce et argent) et politiques (droit et pouvoir) puisque c’est là que se nouent les grands enjeux de société. Pourtant, ses ravages commencent concrètement bien en amont : aux entournures de l’être et au cœur même du quotidien de chacun.

http://www.transparency.ch/fr/
Sur le plan politique, « de nos jours, la corruption est un sujet qui est ouvertement évoqué dans la plupart des pays, et rares sont ceux qui prétendent ne pas en souffrir. C’est là une bonne chose, car les hommes politiques, les représentants patronaux et syndicaux, les journalistes et la société civile ont ainsi, exceptionnellement, l’occasion de s’exprimer d’une seule voix pour dire que l’éradication de ce fléau revêt un caractère d’urgence », déclare Enery Quiñones, chef de l'Unité anti-corruption de l’OCDE[1]. Selon Transparency International (TI)[2], « la corruption consiste en l’abus d'un pouvoir reçu en délégation à des fins privées »[3]. Cette définition permet d'isoler trois éléments constitutifs de la corruption :

- l’abus de pouvoir ;
- à des fins privées (donc ne profitant pas nécessairement à la personne abusant du pouvoir, mais incluant aussi bien les membres de sa proche famille ou ses amis) ;
- un pouvoir que l’on a reçu en délégation (qui peut donc émaner du secteur privé comme du secteur public).
Bref, la corruption enferme les personnes dans leur logique égoïste et ronge les sociétés dans lesquelles elle prend racine. Elle engendre entre autres :

- des inégalités sociales et creuse un fort sentiment d’injustice chez celles et ceux qui la subissent ;
- des relations humaines asymétriques entre les différents acteurs sociaux et des torsions dans la transparence des processus économiques et politiques ;
- des sociétés où règne la loi du plus fort ;
- des manques à gagner parfois gigantesques pour les caisses des Etats ;
- la méfiance et le désespoir des plus démunis qui n’ont pas de moyens de se défendre.

La Banque mondiale estime que plus de 1'000 milliards de dollars sont payés chaque année de manière indue. Au plan suisse, il est évident que la corruption n’est pas absente, mais elle revêt des formes souvent subtiles et est difficile à chiffrer. Pourtant, la presse fait régulièrement état de scandales au niveau des adjudications sur les marchés publics. Ne parlons pas de « l’affaire Giroud » qui secoue actuellement le Valais. Ou encore l’ampleur des fraudes fiscales – marché organisé et véritable mafia – que la Justice découvre en particulier ces derniers temps. 

Sur le plan biblique, la corruption est aussi un fait connu. Inutile d’aller plus loin que le livre de la Genèse pour s’apercevoir que, dès l’origine, l’homme a été corrompu et corrompt à son tour. Dans le livre de Ben Sirac le sage (Siracide ou Ecclésiastique 35, 9-13), on met même en garde les fidèles contre le fait de marchander avec Dieu. N’a-t-on pas tous un jour été tenté de marchander avec le Seigneur : « Si tu me donnes ceci, alors je t’accorderai cela ! » Le marchandage, dans ce cas, est un tue-l’amour.

Pour la Bible, le grand corrupteur c’est Satan. Il s’est attaqué au Christ et à sa mission dès après son baptême, dans le désert. Jésus s’est défendu en s’appuyant sur la Parole de Dieu, dans les Ecritures. Toujours et encore dans l’histoire du monde, Satan ne cesse de tenter l’homme pour le dérouter et le faire chuter en lui faisant croire que le mal, c’est le bien ! La meilleure lutte anti-corruption est encore de s’attacher personnellement au Christ. Lui qui est Vérité, nous rendra libre !

Non, Dieu ne veut pas la corruption. Jésus enjoint ses amis à la fuir comme le péché, puisqu’à terme, elle entraîne la mort. Pourtant, personne n’est épargné et partout les tentations sont grandes d’utiliser à son profit ce qui était destiné à d’autres ou à tous. A nous, disciples du Christ, il est demandé d’avoir un peu de courage. Non seulement de résister à la corruption, mais aussi de la dénoncer pour que soit faite la volonté de Dieu de faire droit au faible et au pauvre. Les causes profondes de la corruption ne sont pas tant à chercher ailleurs, qu’au fond de nous-mêmes. Charité bien ordonnée commence, dit-on, par soi-même. CQFD.

PS : Une campagne de lutte contre la corruption appelée « Exposed 2014 » lancée par les mouvements protestants et évangéliques suisses a pris fin en juillet dernier et avait pour but de récolter un million de signatures et d’adresser cette pétition internationale aux dirigeants du G20. Cf. www.exposed2014.ch

Pascal Tornay




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[1] Tiré de http://www.observateurocde.org/news/archivestory.php/

[2] Transparency International (TI) est une ONGI d'origine allemande ayant pour principale vocation la lutte contre la corruption des gouvernements et institutions gouvernementales mondiaux.

[3] Tiré d’un rapport de Transparency International, Cf. wikipedia sous l’item « corruption »

mardi 29 juillet 2014

Ouverture d'esprit : nouvelle mode ?

Avoir de l’ouverture d’esprit : voilà qui est bien à la mode ! Chacun pourtant pressent que, à juste titre, c’est dans l’ouverture qu’est la réponse la plus radicale aux aspirations fondamentales des êtres humains. Mais quelle est donc cette ouverture capable de nous dévoiler des univers nouveaux ? En fait, à aller gratter un peu plus loin, chacun s’aperçoit assez vite que cette ouverture peut être à la fois une impasse complète et un défi énorme suivant les visions de la situation : 1. Une impasse complète si, par ouverture, je comprends que je puis agir sans discernement, selon mon bon vouloir, et dans la seule écoute de moi-même. Mais qui parle en moi : moi (c’est-à-dire mon identité de fils bien-aimé) ou mes aspirations superficielles ? 2. Un défi énorme si, par ouverture, je comprends que je ne suis rien par moi-même ; que je ne possède rien que je n’aie reçu et que je dois tout, finalement, à cet Autre et à tous ces autres par qui je puis devenir sans cesse ce que je suis !

vendredi 4 juillet 2014

Quelques pensées à améliorer et à diversifier

Arrogance des autorités brésiliennes dans le cadre de la Coupe du monde de foot : « Le scandale est le salaire de l’arrogance. »

La longue attente de la nomination d’un évêque à Sion : « On sait ce qu’on perd ; rarement ce qu’on gagne ! »

Le vote du 9 février : « Le repli identitaire est le masque sous lequel s'avance l’extrémisme. »

Traitement par les médias de la libération des otages en Ukraine : « Il y a plus de joie pour un seul qui retrouve la liberté que pour mille qui errent déjà librement mais sans but. »

Christophe Blocher se retire de la politique : « C’est caché au-dessus des marionnettes que se trame le vrai spectacle ! »

Démission d’Yvan Perrin : « En admettant publiquement ses limites, l’homme politique rehausse paradoxalement sa crédibilité ! »

Sortie de l’équipe d’Espagne : « Se tenir au sommet est un caillou dans le soulier. »

Violences dans le monde : « La violence n’a jamais engendré autre chose qu’elle-même. Elle est l’incarnation d’un totalitarisme absolu.»

Suisse – UE : « Chacun s’entraîne à mieux prononcer : Je veux et j’exige ! On risque de jouer les prolongations… »

Scandales bancaires : « On ne vole qu’aux riches. »

Marché des médicaments: « La philanthropie est aux dirigeants des entreprises pharmaceutiques, ce que l’emplâtre est à la jambe de bois. »

mercredi 4 juin 2014

Au milieu des femmes

Au milieu des femmes

J’arrive de la gare en retard.
Il y avait un homme seul sur les voies ferrées.
J’ouvre la porte derrière le bar.
Des centaines de femmes sur les voies entre avenir et passé.

J’assume le regard.
Des dizaines d’yeux étonnés, éberlués.
J’avance lentement hagard.
Voici un homme sur la voie des femmes !

Je me tiens droit.
Et vois deux femmes s’approcher.
Je cherche discret et coua
Un espace libre où m’échapper.

J’écoute des cheveux aux chevilles :
Des voix de femmes m’arrivent de là-haut.
Alentours, elles sourient
Béatement, et moi le leur renvoie un peu minaud.

Un petit air d’exotisme :
Où mettre ce corps d’homme inattendu ?
Quel est cet univers incongru ?

Tant de femmes… Adrénaline.
Du piment me perce la poitrine.
Voici l’homme : vulnérable, enfin !

jeudi 29 mai 2014

Cycles longs - cycles courts

J’ai souvent des difficultés à ingérer la presse quotidienne. Au fil des pages, je me demande quel sens et quel impact cela peut bien avoir de prendre connaissance de tel ou tel événement en tant que phénomène social sans qu’il soit relié. Relié à un tout, à un contexte plus général, à un faisceau de sens qui n’émane que dans la durée. Que puis-je retenir d’un fait isolé si ce n’est le plaisir de savourer que « moi, je sais ce qui est arrivé, car je l’ai lu dans le journal (où je l’ai vu à la télé ! ». C’est ainsi que je n’ai jamais été abonné à un « quotidien »… Le journalisme d’information quotidienne balbutie, tente des élargissements, des recoupements avec des faits passés, mais reste toujours en surface… Et je n’aime pas perdre mon temps en surface. Alors, soit j’en reste au titre ou aux 5 premières lignes – combien en reste là ? – ou alors je lis les brèves des agences de presse qui, en général, en restent plus ou moins aux faits.

Pour comprendre une réalité, je pense qu’il faut d’abord « être saisi » par ce qui arrive au sens le plus large du terme, diversifier les points de vue, pouvoir élargir le contexte et varier les cycles d’analyse. J’entends par là que, pour relier un fait à un contexte global qui soit significatif, il faut pouvoir le lire, et le relire encore. Un même fait, relu contextuellement dans une analyse à court, à moyen, à long et à très long terme (1), va prendre une importance et une tournure tout à fait nouvelle. C’est seulement en inscrivant un fait à l'intérieur de certaines durées, en le relisant et en le reliant constamment à des environnements politiques plus généraux que nous comprendrons toujours plus profondément, par exemple, le vote du 9 février sur l’initiative « contre l’immigration de masse ». C’est, je crois, dans la conjonction des cycles courts et longs (2) que la compréhension de l’histoire me semble la plus riche.

Le fait est que, traiter un fait aussi sérieusement est un travail et non plus un loisir. Et, en effet, la lecture quotidienne de la presse passe avant tout aujourd'hui pour un loisir dans notre « civilisation »… Ce voyeurisme sans compassion est d’ailleurs souvent décrié.

Bref, en matière d’information, le temps fait son travail de discernement. Ce qui semble important aujourd’hui ne le sera déjà plus demain et ce qui semblait tellement marginal hier, sera peut-être la question cruciale de demain… Personne n’acquiert quelque sagesse que ce soit dans l’instant ! Pour aujourd’hui, donc, j’en reste aux titres, demain m’en dira plus… ou pas, cela dépendra de ma capacité à être relié…

Pascal Tornay


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(1)  Jusqu’à plus de 1000 ans, comme Fernand Braudel dans son livre « La dynamique du capitalisme » (Flammarion, Paris, 1999) ou plus encore lorsqu’il s’agit de l’étude de la trajectoire des civilisations.
(2)  Cycles dits « Kondratiev ». Nikolai Kondratiev est un économiste soviétique célèbre pour sa théorie des cycles économiques, démontrant que les économies capitalistes connaissent une croissance soutenue de long terme (50 à 60 ans), suivie d'une période de dépression.

Cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Nikolai_Kondratiev. Le fond de cette théorie – reprise par un autre économiste, contemporain de Kondratiev, Joseph A. Schumpeter et liée au contexte économique – a été utilisée par d’autres chercheurs comme
William Strauss et Neil Howe aux Etats-Unis pour l’appliquer à d’autres contextes notamment dans l'histoire de la politique électorale des USA.

lundi 7 avril 2014

« Voulez-vous sortir avec moi ? »

Les amoureux le savent bien, eux qui aiment tellement « sortir ensemble » ! Je me demande d’ailleurs s’il n’y a pas là une clé pastorale pour la vie de tout Mouvement chrétien. Sortir, n’est-ce pas là déjà un premier mouvement ?

Explorons un peu concrètement.
Sortir, c’est aller au-dehors. C’est passer un seuil. C’est s’ouvrir, s’aérer.
Sortir, dans l’esprit des jeunes, c’est se changer les idées, rencontrer les copains et copines, aller retrouver un groupe sympa, une fraternité,… l’âme sœur ! Sortir, c’est aussi explorer, s’aventurer, s’offrir de nouvelles opportunités.
Sortir, c’est aller au gré du vent sans toujours avoir de plans précis. Se laisser pénétrer de ce qui se passe ici et maintenant avec sa dose d’imprévus… 
Sortir, c’est se sortir de soi, se mettre sous les yeux d’autrui, prendre le risque d’une parole, d’un regard parfois pas si amical…

De son côté, le pape François invite aussi toute l’Eglise à ce genre de « sortie » à la suite de tant d’autres et en premier le Christ. « Allons ailleurs, dans les bourgs voisins, pour que j’y prêche aussi, car c’est pour cela que je suis sorti », dit Jésus (Mc 1, 38). On nous exhorte donc à « sortir » – « sortir ensemble » puisque le Christ envoie ses disciples deux par deux –, mais ce n’est pas dans un but captatif. Trop souvent, nous sommes sortis dans le but de « récupérer » pour remplir nos lieux de culte, pour relever nos groupes paroissiaux ou nos services d’Eglise. Un tel comportement témoigne tout juste d’une centration sur soi-même et d’une absence de gratuité. Et cela s’est très vite vu et très vite su… Sortir pour le bien de l’autre, fut-ce au prix de mon bien à moi : c’est dans cette sortie-là, radicale, oblative, que le témoignage d’amour est porteur de vie ! Le prix à payer ? Le don de ma vie !

La Bible regorge de situation où quelqu’un a été appelé au-dehors et ce « dehors » n’est pas souvent géographiquement très éloigné, car le Seigneur demande de commencer par son prochain. « Mais qui est donc mon prochain ? » demande le légiste à Jésus (Lc 10, 29). Bonne question Monsieur le légiste : 2000 ans après, l’Eglise continue à se le demander…

Jésus répond par une parabole et conclut : 

–    « Lequel de ces trois, à ton avis, s'est montré le prochain de l'homme tombé aux mains des brigands ? »
–    Le légiste répondit : « Celui-là qui a exercé la miséricorde envers lui. »
–    « Va, et toi aussi, fais de même. »

Le samaritain n’avait comme plan d’action pastorale et de discernement que son cœur disponible et sa miséricorde. Sur sa route, s’est présentée une situation. Il a momentanément mis de côté son programme pour se jeter au service du frère humain blessé et mourant. Ce faisant, il a transgressé la loi religieuse de son temps qui lui interdisait de touché des demi-morts jugés impurs et pourtant, Jésus le donne en exemple… La loi ne fait pas vivre, saint Paul le dira encore avec ses mots (Cf. Rm 7). « Sortir » est une question de vie ou de mort puisqu’il s’agit d’aiguiller nos semblables sur les traces de la Joie de l’Evangile ! « Sortons donc ensemble » sans crainte, si vous le voulez bien, car l’Esprit est à l’œuvre et il nous précède dans tous nos élans !

Pascal Tornay

jeudi 20 mars 2014

La récolte de carottes de Tante Imelda...

Cap dit de Bonne-Espérance, Afrique du Sud
Tant de nos espoirs ne sont-ils pas d’une exquise superficialité ? Ecoutons-nous parler : « J’espère qu’il fera beau demain ; que je pourrai repartir en vacances à Majorque en juillet ;  que la récolte de carottes de tante Imelda sera meilleure que celle de l’an passé (pas difficile, elle n’a rien eu !) ; que Grand Papa ne se cassera pas la pipe dans les escaliers en revenant de chez son dentiste ; que Jérôme réussira enfin son examen de conduite ; que les jeunes cesseront d’uriner sur les rosiers du jardin les soirs de bal ou encore que la taxe-poubelle communale diminuera au prochain semestre... »

Ne sont-ce pas là de vulgaires espoirs ? Vulgaires, au sens de banals, car pas vraiment pris au mot et exprimés à la sauvette : vagues désirs, espoirs sous-investis, sous-enracinés,  faux-espoirs même, espoirs errants, sans filiation, il y en a tant d’espèces… Tant d’espoirs un peu volages peut-être, mais je salue le premier pas encourageant qui consisterait à les prendre au sérieux ! En effet, un véritable espoir peut-il croître à l’aune d’un « Ah, tu verras, tu verras.. » (de Claude Nougaro) ? Ne devrait-on pas, pour qu’il donne le meilleur de lui-même, le prendre à bras le corps et travailler à le planter en nous ?

Si l’on croyait véritablement à la portée de nos espoirs enfouis, si nous laissions les fragiles murmures de nos élans quotidiens avoir prise, je crois que nous serions capables de faire advenir dans notre vie une réalité nouvelle. Ah, la foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, dit Jésus…(Mt 17, 20)

Clamons-le, c’est déjà une immense merveille qu’un homme sur la terre croie que demain sera meilleur ! C’est certes un cri fragile, mais fondamental et capital. Je le crois. Pourtant, sur la durée, personne ne voudrait investir – car il s’agit bien d’un capital que l’on peut aussi bien perdre – son espérance sans qu’il ne repose sur aucun fondement ?

L’espoir doit pouvoir s’enraciner quelque part pour croître, sinon il est vain et finalement destructeur. Il s’enracine, je crois, dans la foi – au sens le plus large du terme dans une espèce de confiance en la suprématie du vrai, du bon, du beau et du bien. Une espèce d’assurance qui prend elle-même sa source à cet endroit de l’Homme que l’on appelle « cœur ». A cet endroit même, où habite notre dignité, notre unité, notre indestructibilité, notre immortalité,… notre divinité !

C’est cela qui m’émerveille et c’est cela que je contemple avec vous aujourd’hui ! Le mystère de l’Homme qui croit malgré tout ! Une foi malhabile qui passe par l’espoir, que les chrétiens vont pousser à un degré inouï – grâce à Dieu – en forgeant un terme plus fort encore : l’espérance ! A tous, il est donc permis d’espérer en raison de ce « cœur habité », ce centre qui, malgré les souillures, les blessures, les éclatements et même la mort, nous conduit vers la Lumière. Quel incroyable GPS ! Comme l’aiguille de la boussole, notre « cœur » ne quitte jamais le Nord. Nous pourrons être dans les pires situations de désespoirs, être totalement perdu dans les ténèbres, notre « cœur » sera cette part si centrale de nous-mêmes, si divine, qu’elle retrouvera toujours les traces de la Lumière. Rien ne peut nous séparer de nous-mêmes et donc de l’amour du Christ, dit saint Paul (Rm 8, 38-39). Professer cela de ses lèvres et le croire dans son cœur, c’est être sauvé dit-il encore (Rm 10, 9).

Certes, nous les chrétiens nous espérons. Mais nous n’espérons pas à notre hauteur ! Qu’aurions-nous de spécial, alors ? Non, nous espérons dans – dedans – le Christ, comme dans l’histoire si juste de ces bébés à naître. Ils parlent de leur maman – enceinte – à l’intérieur d’elle-même, se disant : « Tu crois qu’il y a une vie après l’accouchement ? Tu crois que maman existe, toi ? Tu crois qu’elle va nous aimer ? »

Stèle de Minerve, symbole d'espérance
damecarcas.blogzoom.fr
Pour ma part, mes faux-espoirs, mes désirs « bling-bling » ont été mis à rude épreuve dans ma courte vie et se sont transformés en espérances fondées et réelles dans lesquelles je ne cesse d’essayer d’investir au maximum. De grandes épreuves ont purifié l’espérance des chrétiens d’hier et d’aujourd’hui pour le fonder sur le seul Christ ressuscité, dont l’expérience de la présence est inscrite dans la chair de celles et ceux qui ont souffert et souffrent encore, témoignant ainsi des espérances les plus folles et donc, dans le Christ, les plus réalistes ! Je témoigne qu’il est victorieux avec moi, dans ma vie. Alors que tout semblait être au plus mal, c’est là qu’il m’a appelé à sortir de la mort – et il y en a tant de sortes… Il l’a fait pour chacun d’entre nous ! Sur la croix, Il a tout pris sur lui. Il a passé la mort assumant tous les désespoirs des hommes. Et, traversant les ravins de la mort dans l’amour, le Père l’a ressuscité d’entre les morts pour que quiconque puisse fonder réellement sur Lui tous ses espoirs, tous ses désirs.

Le Christ est victorieux de toute mort ! Et, pour tous ceux qui mettent leur confiance en Lui, Il devient la pierre d’angle sur laquelle tous les espoirs humains peuvent reposer. Dieu a tant aimé l’Homme qu’il a voulu partager en tout sa condition excepté le péché (Ph 2) et croyez-le, rien de ce qui touche un cœur d’Homme ne lui est indifférent. Rien, pas même la récolte de carottes tant attendue de tante Imelda…

Pascal Tornay

dimanche 5 janvier 2014

Veille intérieure



(c) http://sergecar.perso.neuf.fr
Belle et bonne année à tous ! Elle sera extraordinaire si nous laissons jaillir le Meilleur en nous. Pour cela, veillons à veiller, régulièrement pour que notre vie soit toujours orientée, c'est à dire tournée vers la lumière de l'aurore. L'éveil ne débute-t-il pas au creux de soi dans l'émerveillement de cet Autre en soi ?

Veille intérieure

Se tourner vers la lumière
Intérieure
Pour tenir dans la nuit
Et demeurer
Attentif

Se dresser contre l’injustice
Intérieure
Pour tenir dans la paix
Et demeurer
Fort
(c) Diocèse de Fréjus-Toulon

S’ouvrir à l’altérité
Intérieure
Pour tenir dans la relation
Et demeurer
Juste

Se battre pour la vérité
Intérieure
Pour tenir dans l’amour
Et demeurer
Libre

Se laisser pétrir par l’amour
Intérieur
Pour tenir dans la joie
Et demeurer
Humain.